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vendredi 23 septembre 2011

Le retour des mercenaires

____L'heure est aux économies, au désengagement de l'Etat et aux privatisations généralisées, depuis les années 90 surtout.
L'armée n'échappe pas à cette évolution, pour l'instant plus anglo-saxonne que française. Mais jusqu'à quand?...


_La tentation des mercenaires est forte: "L'apparition de sociétés commerciales privées qui ont fait de la guerre un business lucratif date de la chute du mur de Berlin. Les Etats occidentaux ont rapidement pris la mesure des économies potentielles que permettrait une cure d'amaigrissement de leurs ressources militaires, devenues moins utiles après le déclin de la menace soviétique. La professionnalisation, l'outsourcing sont devenus la règle..."
L'époque de Bob Denard est terminée. On a changé d'échelle.

____Les USA, où le poids de l'armée est devenu considérable,
comme le craignait Eisenhower, ont la plus longue pratique de la
privatisation , de l'introduction de sociétés militaires privées, surtout depuis l'engagement en Irak, qu'on a pu appeler une guerre privatisée.
On se souvient du comportement de compagnies comme
Blackwater, qui n'ont pas laissé d'excellents souvenirs sur le terrain. Les contractors, bien payés, échappent souvent à l'autorité militaire et à ses règles mais ont l'avantage de permettre de limiter les effets psychologiques des morts au combat sur la population américaine (La guerre du Vietnam a été méditée...)
__________Est-ce le retour des condottieres, une spectaculaire régression?
-Le Royaume-Uni s'est aussi bien engagée dans cette logique, même dans des domaines ultrasensibles, comme la dissuation nucléaire.

____La France commence aussi à expérimenter la formule, tout en le démentant publiquement. Politique assez schizophrène pour l'instant.
Elle pourrait autoriser le mercenariat, interdit depuis 2003

"Sans le dire vraiment, mais sans le cacher tout à fait, le gouvernement se prépare à réintroduire le mercenariat dans le droit français. Interdite depuis 2003, l'attribution à des entreprises privées employant des hommes en armes de missions "régaliennes", donc réservées en principe à l'État et à ses armées, est un sujet brûlant. L'Élysée n'y est pas opposé sur le fond.."
...Malgré les réticences de certains responsables de l'armée
"...En France, la notion de force armée légitime, conception latine issue de la Révolution française, définit l'utilisation de la violence d'Etat. Pour le Général Bruno Neveux, une figure de l'armée française qui a commandé avec brio la délicate opération Artémis en RDC en 2003, La force légitime émane d'un pouvoir politique légitime. «La force ne peut trouver sa raison d'être que dans un objectif politique, ce n'est pas une finalité en soi, mais un instrument au se
rvice d'une société démocratique. La force armée est de nature régalienne, apanage de l'Etat. Personne ne remet en cause le contrôle absolu de l'Etat».
la spécificité des armées est, en principe, un savoir-faire qui comporte l’utilisation d’une force maîtrisée et proportionnée, dans un cadre légitime, au nom de la volonté publique, d’un Etat, etc. Sous-traiter une fraction de cette « force légitime » à des privés plus ou moins contrôlés, c’est franchir une crête, créer la confusion, changer de nature, prendre le risque de dévaloriser les armées, les militaires. Il ne faut pas confondre le recours ponctuel à des prestataires (services, maintenance, transport par avions ou hélicoptères, etc.), et une action de longue durée, impliquant un Etat, une armée, une chaîne de commandement, des règles d’engagement et une tradition, etc.
Il ne faudrait pas non plus, plaident certains, que le recours aux SMP suscite plus de difficultés nouvelles qu’il n’apporte de solutions (par manque de capacités) ou d’économies (étant entendu que ces services « délocalisés » seraient par nature moins chers). Des experts européens redoutent notamment que, dans des pays où la pratique du contrat commercial est moins ancrée, les mécanismes de contrôle ne génèrent des coûts qui rendraient l’opération nulle ou négative. Il y aurait donc à identifier des seuils de rentabilité, et à les mettre en balance avec les limites du genre : rupture de la chaîne de commandement ; difficultés de coordination ; poids du contrôle d’exécution des marchés, etc.
Les militaires insistent, pour leur part, sur le fait que leur « cœur de métier » (la mission, l’action au milieu des populations, le recours aux armes éventuellement offensives, etc) n’est pas externalisable ; et qu’il convient de ne jamais mélanger, sur le terrain, les soldats réguliers et les privés en armes.
Un colonel français, spéci
aliste de doctrine, résumait au cours de ce colloque les (bonnes) raisons de ne pas recourir à des SMP :
- normes insuffisantes (casier judiciaire douteux, etc) ;
- confusion, dans le regard de l’opinion, avec les troupes régulières ;
- fonctionnement trop autonome (comme la société Blackwater en Irak) ;
- déséquilibre de l’économie locale (en raison des émoluments hors de proportion des personnels « mercenaires ») ;
- manque de cadre réglementaire et juridique…"


Mais il y a lieu de s'inquiéter pour l'avenir: un lobbying intense se développe à l'échelle de la planète visant à aboutir à
un marché mondial de la guerre pour les compagnies militaires privées
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Il serait urgent de relire Machiavel:
« Voulez-vous donc vous mettre dans l’impuissance de vaincre : employez des troupes auxiliaires, beaucoup plus dangereuses encore que les mercenaires. Avec les premières, en effet, votre ruine est toute préparée ; car ces troupes sont toutes unies et toutes formées à obéir à un autre que vous ; au lieu que, quant aux mercenaires, pour qu’elles puissent agir contre vous, et vous nuire après avoir vaincu, il leur faut et plus de temps et une occasion plus favorable : elles ne forment Point un seul corps ; c’est vous qui les avez rassemblées, c’est par vous qu’elles sont payées. Quel que soit donc le chef que vous leur ayez donné, il n’est pas possible qu’il prenne à l’instant sur elles une telle autorité qu’il puisse s’en servir contre vous-même. En un mot, ce qu’on doit craindre des troupes Mercenaires, c’est leur lâcheté ; avec des troupes auxiliaires, c’est leur valeur. Aussi les princes sages ont-ils toujours répugné à employer ces deux sortes de troupes, et ont-ils préféré leurs propres forces, aimant mieux être battus avec celles-ci que victorieux avec celles d’autrui ; et ne regardant point comme une vraie victoire celle dont ils peuvent être redevables à des forces étrangères. »

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