La laïcité est un combat, une lutte pour la tolérance, toujours à (re)construire.
Mais au pays où les Evangélistes et les diverses sectes ont pignon sur rue et sur les institutions, où les références religieuses, que l'histoire explique, tiennent une place fondamentale, expliquer ce qu'est la laïcité, comme nous la concevons et la pratiquons, relève du défi.
Surtout du côté de la Bible Belt
Aussi difficile que de faire comprendre à un Inuit les douceurs des Tropiques, ou à Bill Gates les difficultés d'un chômeur...
Malgré une laïcité formelle, les références religieuses sont constantes, jusqu'à la Maison Blanche, jusque sur le billet vert.
L'absence de rapport à une laïcité fondée sur la tradition d'une Révolution démocratique et des Droits de l'Homme, l'histoire récente de ce pays et le communautarisme institutionnalisé peuvent expliquer que la confusion soit grande sur la notion de tolérance, notion déjà équivoque par elle-même.
Comme pour une "philosophe" (?), Martha Nussbaum, qui considère que la laïcité républicaine est un abus de pouvoir et qui demande de tolérer... toute manifestation culturelle ou religieuse. Pourquoi pas les pratiques sectaires?
Elle est en tous cas favorable au port de la burka.
"Ce professeur de Chicago, auteur des Emotions démocratiques
(2011), comprend la laïcité comme une politique d'intolérance à l'égard
des religions. Certes, ce contresens est diffusé à l'envi par les
fondamentalistes et intégristes de tout poil. Mais on attendait
justement d'une philosophe aussi réputée qu'elle défende un point de vue
moins borné. Pour Nussbaum, la « laïcité à la française » est une... « Eglise d'Etat ». Rien que ça ! Dans sa simplicité sublime, l'article 1er de la loi de 1905 stipule pourtant que « la République assure la liberté de conscience ».
Une liberté de conscience qui, rappelons-le, est davantage que la
liberté religieuse, puisqu'elle est la liberté garantie à tous les
citoyens d'avoir vis-à-vis de la religion la position de leur choix,
croyance ou incroyance, la première se déclinant selon une multitude de
modalités (les différentes religions), la seconde ayant deux options
principales : l'agnosticisme et l'athéisme. Nussbaum ne
voit pas que le principe (démocratique) de la tolérance religieuse
qu'elle défend ne peut éviter d'impliquer comme une norme le fait pour
un citoyen d'appartenir à une religion. Si le principe (républicain) de
la laïcité lui est supérieur, c'est justement parce que, du fait de sa
neutralité, il n'énonce aucune norme en la matière...
En somme, d'après Nussbaum, l'Etat devrait garantir la liberté d'agir à
des groupes religieux qui interdiraient à leurs membres la liberté
d'agir... Le meilleur des mondes... "
La tolérance ne fait pas vraiment partie du rêve américain.
La tolérance bien comprise peut faire le lit de l'inacceptable. Cette notion paradoxale, sans référence à des valeurs républicaines assurées, peut être souvent source de confusions multiples:
".... Une tolérance absolue ne peut être
exigée : la tolérance réelle est toujours finie. La tolérance est une
notion seulement négative : tolérer, c’est ne pas exclure. La laïcité,
si on ne la confond pas avec elle, est en elle-même une notion
positive : elle ouvre un dialogue. La tolérance prépare seulement cette
ouverture, et il serait bien regrettable que des communautés qui sont en
situation de se tolérer ne mettent pas à profit cette situation pour
aller plus loin. Comme il est même probable que dans cette situation
elles ne pourront réussir une tolérance pure et exacte, il est
inévitable qu’elles soient contraintes d’inventer la laïcité. Celle-ci
n’est pas un simple luxe qu’on pourrait s’accorder ou dont au contraire
on pourrait choisir de se passer, une fois la tolérance établie, mais la
fin dont la tolérance est le premier moyen. Dès que des communautés
sont en situation de se tolérer, c’est-à-dire lorsque cette situation
appelle à une possibilité d’intégration, la question de la laïcité se
pose puisque ces communautés ne peuvent en rester à une simple
indifférence réciproque qui n’appellerait même pas la tolérance : on ne
réussit à éviter de descendre au-dessous du degré zéro de la sociabilité
qu’en se rendant capable de s’élever au-dessus. C’est pourquoi le
« communautarisme » n’est pas une solution, mais la négation du problème
et un expédient hypocrite, simple instrument de domination..."
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