L'alimentation, un droit fondamental
La Déclaration universelle des droits de l'homme (1948) proclamait que "Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation".Au Sommet mondial de l'alimentation, en 1996, les chefs de 185 pays et la Communauté européenne ont réaffirmé, "le droit de chaque être humain d'avoir accès à une nourriture saine et nutritive conformément au droit à une nourriture adéquate et au droit fondamental de chacun d'être à l'abri de la faim." Ils ont également proclamé leur volonté de réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d'ici 2015.
Pourtant, la FAO (Food and Agriculture Organization faisant partie des l'ONU) affirme dans son dernier rapport que 862 millions de personnes souffrent de malnutrition à travers le monde.
C'est sur cette toile de fond peu réjouissante que les prix des denrées alimentaires ont significativement augmenté ces derniers temps, provoquant des émeutes de la faim dans une trentaine de pays. Spéculation sur les marché agricoles, production d'agrocarburant à grande échelle, suppression des mécanismes de régulation des stocks et des échanges : les pays riches ont une responsabilité majeure dans ce processus.
( Grain de Sable )
Economiste spécialisé dans tout ce qui touche à l'agriculture dans le monde, Jacques Berthelot a rédigé une analyse particulièrement bien documentée de la flambée des prix agricoles. Il démontre que ce ne sont ni la Chine ni l'Inde les responsables de cette flambée mais bien l'Union Européenne et les États-Unis. Il souligne aussi que la spéculation financière, comme toujours dans une économie livrée aux seuls marchés, participe très largement aux « émeutes de la faim ». La version proposée ici est un résumé de son travail pour aller directement à l'essentiel. La version intégrale est disponible via cette page : Analyse complète de Jacques Berthelot sur le site d'Attac.
Depuis plusieurs jours, des manifestations populaires prennent forme dans de nombreux pays du Sud. Les raisons de ce mécontentement sont partout semblables ; les prix de la nourriture de base ont augmenté de manière aussi brutale qu'importante et les populations, déjà paupérisées par la mondialisation, se retrouvent dans l'incapacité d'assumer cette charge supplémentaire. Les peuples ont faim ! Les causes de cette flambée sont multiples mais elles sont globalement issues des jeux économiques. D'une part, une spéculation de replis sur les denrées alimentaires suite à la crise des subprimes, d'autre part la production d'agrocarburants et le réchauffement climatique. Pourtant, certains journalistes pointent dans leurs articles les autorités locales africaines comme responsables des choix catastrophiques en matière de politiques alimentaires, semblant ignorer que les politiques agricoles des pays du Sud sont soumises aux conditionnalités de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international (FMI) ou encore aux Accords de partenariat économique (APE). Ceux qui façonnent l'opinion publique font ici preuve d'une légèreté étonnamment orientée. C'est ainsi que l'on peut lire dans la presse écrite belge : « de nombreux pays du continent [africain] importent des aliments au lieu de les produire, parce que les autorités locales donnent la priorité aux cultures d'exportation afin d'en retirer les devises pour acheter ce qu'ils ne produisent pas ». Raccourci étonnant. Aussi étonnant que simplificateur et qui dédouane à peu de frais les politiques néolibérales de privatisation, de plans d'ajustement structurel, imposés depuis bientôt trente ans par les institutions financières internationales (IFI) et les gouvernements du Nord au reste de la planète.
Le jugement de M. Olivier de Schutter, rapporteur des Nations unies sur le droit à l'alimentation, est sévère pour le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, les pays riches : « Beaucoup criaient dans le désert depuis des années pour qu'on soutienne l'agriculture dans les pays en développement. Rien n'a été fait contre la spéculation sur les matières premières, pourtant prévisible depuis qu'avec la chute de la bourse, les investisseurs se repliaient sur ces marchés. […] Les plans d'ajustement structurel du Fonds monétaire international ont poussé les pays les plus endettés, notamment en Afrique subsaharienne, à développer des cultures d'exportation et à importer la nourriture qu'ils consommaient. Cette libéralisation les a rendus vulnérables à la volatilité des prix (Le Monde, 3 mai 2008. ). »
Le point de vue de M. Michel Barnier, ministre français de l'agriculture, n'est pas entièrement différent, bien que lui défende la politique agricole de l'Union européenne, souvent mise en cause, en Afrique notamment : « Le choix de cultures d'exportation dans les pays pauvres a détruit les cultures vivrières et fait disparaître les paysans. […] Mettre en compétition des agriculteurs dont les niveaux de compétitivité varient de 1 à 1 000, c'est à coup sûr condamner les plus pauvres (Michel Barnier, « Agriculture : pas question d'autarcie… », Les Echos, 2-3 mai 2008.). »
L'analyse du rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l'alimentation ne semble pas avoir convaincu les Etats-Unis davantage que celle du ministre français. Répondant à M. Barnier dans Les Echos, l'ambassadeur américain à Paris, M. Craig Stapleton, préfère imputer la crise alimentaire à « certains pays producteurs de céréales [qui] ont choisi de restreindre leurs exportations, exacerbant la tension sur l'offre ». Après avoir fait l'éloge du maïs génétiquement modifié qui, estime-t-il, « pourrait augmenter la production agricole dans les régions arides », il prescrit : « En fait, le moyen le plus efficace pour inciter à produire plus, dans les pays développés comme dans les pays en voie de développement, serait de réduire les distorsions commerciales. » Ce genre d'ordonnance s'abrite derrière un avis de M. Dominique Strauss-Kahn, directeur général du Fonds monétaire international, qui semble avoir enchanté Washington : « Personne ne devrait oublier que toutes les nations comptent sur le libre-échange pour nourrir leur population (Craig Stapleton, « Agriculture, pas question de limites aux échanges », Les Echos, 2-3 mai 2008). »
Comme le remarque ironiquement un vieux dicton américain, quand on ne dispose que d'un marteau, le monde ressemble forcément à un clou…
Que fait l'Europe ? X CAMPAGNE La PAC est malade, signons la PAC.
En 2008, un « bilan de santé « de la PAC est engagé afin d'évaluer les politiques en place et anticiper les évolutions pour la prochaine réforme de 2013. Dans ce contexte et dans le cadre de la présidence française de l'Union europénne au deuxième semestre 2008, nous demandons un débat de fond sur les objectifs de la PAC.
La PAC doit poursuivre en priorité un objectif de souveraineté alimentaire. Cela signifie que l'agriculture doit donc avant tout assurer l'indépendance alimentaire de l'UE et que la PAC doit se concentrer sur l'approvisionnement de son marché intérieur. Cela va également dans le sens de la reconnaissance du droit des autres pays de se nourrir par eux-mêmes et de l'abandon d'une politique agressive d'exportation ainsi que de dumping.
Ce principe de souveraineté alimentaire doit être mis au service d'une agriculture durable et solidaire c'est-à-dire une agriculture diversifiée et de qualité, satisfaisant prioritairement les besoins des marchés locaux, créatrice d'emploi, répartie sur tout le territoire, respectueuse de l'environnement, ainsi qu'à forte valeur culturelle.
Les effets de la PAC dans les pays du sud : analyse des responsabilités européennes.
Contre sommet d'Annecy - Gilles Lemaire -Un Conseil informel des ministres de l'Agriculture aura lieu à Annecy les 22 et 23 septembre prochain pour discuter de la Politique Agricole Commune d'après 2013. Nous appelons à un rassemblement de toutes les associations et de tous les citoyens concernés les samedi 20 et dimanche 21 septembre.
Organiser la famine et criminaliser ceux qui la fuient- Jean Ziegler --Ancien rapporteur des Nations unies sur le droit à l'alimentation, Jean Ziegler décrit le calvaire des Africains qui tentent de fuir la famine dans leur pays et que l'Europe laisse mourir à ses portes. Chiffres à l'appui, l'auteur dénonce la formidable hypocrisie de l'agence européenne Frontex mise en place par Bruxelles.
OGM, agrocarburants : quels impacts sur l'agriculture ? D'après l'ONU, les OGM ne résoudront pas les problèmes de faim dans le monde, encore un mythe qui s'écroule.
Alors que les appels partisans se multiplient pour le recours massif à la technologie transgénique afin de « résoudre la crise alimentaire mondiale », de nouvelles études scientifiques viennent contredire ces voix et révèlent que la modification génétique diminue la productivité des cultures.
Agrocarburants : les prix montent à la pompe et dans l'assiette ! - Christian Berdot des Amis de la Terre
« Le nouveau dilemme : des carburants chers impliquent des calories chères »Kuantan, Malaisie L'augmentation des prix de l'huile de cuisine oblige les habitants du plus grand bidonville de l'Inde à Mumbai à réduire leur ration. Les boulangeries aux Etats-Unis s'inquiètent de l'augmentation des matières grasses. Et ici, en Malaisie, des usines toutes neuves construites pour transformer l'huile en diesel tournent à vide alors que leurs propriétaires ne peuvent plus se payer la matière première.
Le même auteur a également mis en ligne un article concernant les conditions sociales des paysans brésiliens qui cultivent la cane à sucre pour les agrocarburants. Lire l'article
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- Agriculture et spéculation
-Nourrir la planète ou gonfler les profits ?
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