Le rêve?
A quelques pas de San Francisco émergea un jour une cité idéale.
Une sorte de paradis de la recherche de pointe, voué essentiellement au numérique, aux recherches d'avant-garde, à la pensée et l'élaboration du monde de demain, de plus en plus dématérialisé.
D'un avenir idéal où pourrait se créer aussi l'homme futur, avec la société qui va avec,
complètement repensée, sur la base de l'horizontalité la plus parfaite.
Certains objectifs dépassent déjà les espérances initiales, mais l'utopie concrète érigée là-bas et ailleurs révéla assez vite ses failles.
Après avoir parlé de rêve californien, les observateurs non béats en détectent et en analysent aujourd'hui les limites, les défauts, voire parfois une certaine violence, sous des apparences cool et bon enfant.
On est passé parfois du rêve au cauchemar (*)
Le paradis s'est transformé dans certains secteurs en dictature douce, où l'idéal libertaire s'est transformé peu à peu en monde impitoyable, la fabrique d'un monde parfois inquiétant , où l'addiction et la captation de l'attention deviennent de fait un objectif, à des fins de marchandisation.
Les critiques ne manquent pas, au sein même de la cité radieuse et de ses dérives institutionnelles, économiques et idéologiques. La petite souris des débuts a parfois accouché de monstres à la vocation dominatrice du monde des esprits et de la haute finance.
La siliconisation accélérée du monde, et surtout de son esprit, parfois équivoque, parfois dangereux, suit son chemin, là, et maintenant aussi ailleurs...
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(*) ...L’informatique et internet ont été des rêves. Des rêves de liberté, d’émancipation, d’égalité, et pour l’heure, ils sont en passe d’être dénaturés et confisqués. De lentement glisser vers la dystopie. Sacrifiés sur l’autel du profit et de la cupidité. Car si l’essor des technologies numériques a eu des effets positifs indéniables, facilitant la libre expression, la communication, la collaboration et l’accès à la connaissance, il a délaissé les aspirations et utopies originelles.
Les années 2010 ont vu une hyper-concentration des pouvoirs au profit de quelques acteurs. Google s’accapare 90% des recherches dans le monde. Facebook compte plus de 2 milliards d’utilisateurs actifs. Ces deux géants ont une influence sur 70% du trafic sur internet.
Les années 2010 ont aussi été synonymes de désenchantement quant aux intentions de ces multinationales. Affaire Snowden et espionnage massif des citoyens, revente des données personnelles à l’insu des utilisateurs, jeu d’influence sur les élections, fake news, culte du secret et opacité à tous les niveaux… Désormais, la liste est longue.
Ces entreprises, de fait, ne rompent en rien avec les mauvaises pratiques de leurs aînées. S’ajoute à cela, le projet, totalement contraire à l’esprit d’internet et de ses créateurs, de rétrécir l’espace dans lequel nous évoluons, de refermer et de clôturer le vaste territoire que représente le Web.
Comme l’avait fait remarquer le chercheur Evgeny Morozov dans un article paru en 2012, nous ne parcourons plus le Web mais le voyons à travers le prisme –réducteur– des réseaux sociaux et, aujourd’hui, des applications. Nous ne flânons plus sur le Web, nous n’explorons plus cette immense contrée qu’il a été jadis, nous naviguons dans un périmètre toujours plus réduit, borné par nos amis ou par les frontières posées par les concepteurs d’applications.
Naviguer sur Facebook, ce n’est pas naviguer sur le Web. C’est rester prisonnier de l’écosystème façonné par Marc Zuckerberg et ne pas en sortir. Prisonnier d’une bulle...."
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