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mardi 12 mai 2020

Net-dérives

Une nette dérive sur le Net
           C'est ce à qui on a assisté depuis les premiers temps du confinement.
            Elle n'est pas née de rien, elle n'a fait qu'amplifier des tendances déjà existantes. Avec, en plus , les nécessités dues au télétravail de plus en plus pratiqué. Jusqu'à faire chauffer les serveurs, ralentir les débits, énerver les utilisateurs.
  Une frénésie liée au besoin d'occuper un temps qui n'en finissait pas, de répondre à l'oisiveté imposée, au besoin de calmer les inquiétudes de l'esprit, l'incertitude ambiante parfois pesante,  la difficulté d'assumer la vie familiale en continu, avec ses failles et ses limites. Tout cela lié à des propositions explosives des vendeurs de loisirs infinis sur la toile, renouvelant leurs propositions aguichantes.
  Que de jours et de nuits passées à en perdre toute notion du temps, du réel, dans un monde parallèle où Netflix, Facebook and Co servaient de dérivatifs!
   Pour le meilleur et pour le pire.Une dépendance souvent net-tement compulsive, où l'esprit se perdait dans les labyrinthes du virtuel. Jusqu' au sentiment d'irréalité, en résonance avec celui qui était ressenti venant du monde réel. Oublier était devenu l'urgence.
    Certain l'ont mal vécu, expérimentant l'ambiguïté du Net, l'enchantement étant devenu servitude.  Pour le pire plus que pour le meilleur.. D'autres ont perçu cette net-frénésie de manière distante, parfois amusée, souvent énervée. Comme un certain Laurent, à l'humour parfois ravageur, dénonçant les dérives bêtifiantes des usages à haute dose du clavier, nous rendant parfois dépendants de toutes les formes d'influences incontrôlées:
          "...Jamais, durant ces deux mois de confinement, nous n'avons autant été bombardés de conseils édictés par les nouveaux gourous du net. On a eu droit à tout, absolument à tout.
   La totale, dans son intégralité, in extenso, en version originale sous-titrée, du désormais traditionnel «Comment parler à vos moutards du pourquoi du comment de la crise actuelle» –terrorisme, pandémie, Dieu et ses prophètes, mamie et ses hémorroïdes, le climat et ses changements– à «la meilleure façon de cuire son (putain de) pain au levain» –au four, c'est mieux.
    Sans oublier les innombrables pourquoi: pourquoi vous baisez moins quand vous êtes confinés à l'intérieur de vous-mêmes? Pourquoi les Suédois n'ont-ils pas forcément raison d'avoir tort avant tout le monde? Pourquoi mélanger de la chloroquine avec du Fanta Orange n'est pas a priori une bonne idée? Pourquoi se mettre au violon en étant confiné pourrait permettre de résoudre le problème de la faim dans le monde? Pourquoi les veufs bretons sont-ils moins susceptibles d'attraper le coronavirus que les veuves qui habitent dans la périphérie de Nice?
   Ce qu'il convient de lire pour comprendre ce qui nous arrive. Ce qu'il faut éviter de manger. Les films à voir absolument. Les aliments à privilégier. La stratégie à adopter face à une fuite d'eau pendant une épidémie de Covid-19. Le sommeil! Comment bien dormir quand vous n'avez plus rien à foutre dans votre vie de merde? Comment ajuster le débit de son robinet d'eau pour ne pas abîmer de trop la peau de vos paumes de mains? Comment porter un masque quand vous descendez les poubelles par une nuit de pleine lune? Comment s'occuper de votre voiture si vous l'avez laissée face à un voisin dont la femme travaille à la maison de retraite où agonise la tante de votre belle-mère qui vous fait la gueule depuis que vous avez refusé d'envoyer vos enfants dormir chez elle?    
  Tout, on a eu le droit à tout, je vous dis.
 Comme si, devenus tout à coup cons comme des crevettes –je m'inclus dans le troupeau–, nous avions perdu toute capacité réflexive. Comme si désormais, par les temps qui courent, la moindre de nos initiatives devait être avalisée, confirmée, approuvée par un passage sur internet. Hors le net, point de salut.
  Comme si penser par soi-même était devenu une activité illégale et jugée répréhensible par l'ensemble de la société. Ne pense plus, gamin, on s'occupe de tout. De tes courses comme de tes amours. De ton portefeuille, de l'éducation de tes mômes, de tes choix culturels, de tes plats à cuisiner, de ta queue et de tes rides, de tes prochaines vacances comme de la forme de ton cercueil...."
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