Une vraie fausse"guerre" ?
En tous cas une guerre mal engagée, si on peut parler de guerre...
Détermination absolue: c'est le nom donné par le Pentagone à son engagement, dont se gausse une certaine presse américaine, au vu de l'indétermination et de l'aspect limité, presque symbolique,des offensives.
C'est plutôt le bazar, l'incoordination, les vélléités, les contradictions au niveau de la coalition, .dans ce conflit incertain et lourd de menaces, qui risque de durer et dont nous peinons à imaginer toutes les conséquences.
En France même, les divisions internes se font jour, malgré les mâles accents officiels.
Une non-guerre qui est déjà un échec.
Face à un panier à crabes, une coalition hétéroclite, mais non sans stratégie ni moyens (*),dont on peut juste espérer qu'elle se défasse rapidement de par ses divisions internes et son défaut d'organisation durable.
Que celui qui a des idées claires sur la question lève le doigt!
Toute analyse actuelle sur le sujet, sur ce jeu tragique à multiples bandes, est à prendre cum grano salis.
Il est bon de rappeler certaines données geopolitiques de base.
Dans le chaudron Moyen-Oriental, Daesh se glisse dans un vide.
Un vide qu'ont contribué à créer les puissances qui crient maintenant au loup.
On peut accorder quelque crédit au fin connaisseur qu'est Pierre Conesa quand il affirme:
: "Le terrorisme ne se combat pas par la guerre"
"Les
militaires sont en train de rouler sur la jante, parce que nous avons
rarement été confrontés à un champ d’intervention aussi large. Nous menons actuellement quatre guerres qui disent assez bien les contradictions de la coalition.
Il y a la guerre des Turcs contre les Kurdes. C’est la priorité turque bien avant l’Etat islamique.
La deuxième guerre, c’est une guerre entre sunnites et chiites. Neuf
pays de la région sont déchirés par cette affrontement (L'Afghanistan,
le Pakistan, la Syrie, l'Irak, le Yémen, Bahreïn, le Liban, la Somalie
et même la Malaisie). C’est une guerre de religion et nous pensons que
comme nous sommes une tierce partie, nous pouvons intervenir dans ce
conflit. C’est une aberration intellectuelle.
La troisième guerre
qui est en train de s’ouvrir et qui est peut-être la plus
« intéressante » c’est une guerre entre islamistes, il y a de plus en
plus de dissidents ou d’anciens d’Al-Qaïda qui se rallient à l’Etat
islamique, mais qui, de fait, suscitent une opposition forte des
islamistes en place. Si j’étais complètement cynique — ou réaliste,
c’est selon — je dirais que la solution, c’est de les laisser se
massacrer entre eux.
La dernière guerre enfin, c’est la guerre
que les Occidentaux mènent contre les pays de la région : c’est
d'ailleurs la quatrième guerre que les Etats-Unis mènent dans cette
région. On voit aujourd’hui ce que ça donne : les Occidentaux sont
devenus des cibles dans cette partie du monde et c’est le groupe
islamiste qui coupera le plus de têtes qui remportera la partie sur le
terrain médiatique.
Ce que l'on peut dire et déduire, après avoir
listé toutes ces guerres, c'est que chacun des participants a son
agenda propre et inévitablement celui-ci entrera inévitablement en
conflit avec l’agenda de la coalition....
Le processus décisionnel est complètement irrationnel. Est-ce qu’il faut sauver le docteur Frankenstein. L’Arabie saoudite est largement responsable de ce qu’il se passe
et on est en train de la défendre alors que c’est un Etat — là au sens
strict du terme — qui applique les mêmes méthodes que l’Etat islamique.
L’Arabie saoudite, c’est des dizaines de décapitations publiques chaque
année, les femmes réprimées, l’interdiction de tout autre culte sur le
territoire. C’est un exemple qui prouve que nous n’avons aucun objectif
politique. Nous avons un objectif militaire qui est de réduire l’Etat
islamique, ce sera très long et l'on ne peut pas espérer le réduire
complètement sans troupes au sol. On est là face à une autre
contradiction : les Occidentaux sont, pour l’instant, opposés à l’envoi
de troupes sur le terrain. Mais qui va faire le boulot ? Qui peut penser que les Saoudiens vont envoyer des troupes pour défendre le régime chiite de Bagdad ? C'est impensable. ..
La seule alternative, c’est une conditionnalité politique forte. Il
faudrait afficher des objectifs clairs notamment vis-à-vis des pays qui
ont donné naissance au salafisme, en particulier l’Arabie saoudite. On
vous aide à vous sauver mais en retour vous acceptez la tolérance
religieuse. D'ailleurs, comment voulez-vous justifier le fait de
combattre des islamistes en s’alliant avec les soutiens historiques de
ces islamistes ?...
Le terrorisme ne se
combat pas par la guerre. Le terrorisme, c’est un concept. Notre ennemi,
il faut le qualifier : c’est le salafisme djihadiste, c’est-à-dire
l’idéologie qui s’est répandue à partir de l’Arabie saoudite pour
combattre les frères musulmans. C’est un conflit interne au monde
arabo-musulman. Quand il y a eu la guerre en Afghanistan, toute l’aide
américaine passait par l’Arabie saoudite et les services secrets
pakistanais. Une des conditions mises, à l’époque, par le prince Turki
qui était chef des renseignements saoudiens, c’était que les madrasas
pakistanaises (les écoles coraniques) enseignent
l’islam hanbalite, c’est-à-dire l’islam que l’on retrouve en Arabie
saoudite. C’est comme ça que l’on a créé les talibans et l'on n'a pas vu
le coup venir. Le risque, c’est de repartir dans le même engrenage
fatal....
En entraînant l’Occident
dans la guerre, l’Etat islamique a obtenu ce qu’il voulait sans doute
dès le départ. Et le piège s’est refermé. Aujourd’hui, nous ne savons
pas comment mener cette guerre sans renforcer soit le régime syrien,
soit le régime iranien. Nous leur rendons un sacré service car
fondamentalement nous ne pouvons pas faire sans ces deux pays que Laurent Fabius avait mis sur sa liste noire. Je vous avoue que je suis très inquiet quand je vois la politique étrangère que nous menons actuellement..."
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