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vendredi 29 décembre 2017

Tomates de Noël

Tomates-en-tous-temps

                                     A toutes les sauces.

                           Ou: un concentré de la mondialisation à tout-va...
     Elles sont rouges comme le bonnet du Père Noël et deviennent un superconcentré 
 dans votre pizza ou autre ketchup.
                          Le concentré de tomates chinois est omniprésent dans la world food, la nourriture mondialisée qu’on engloutit du nord au sud, quels que soient ses goûts et ses revenus. Sauces, soupes, pizzas, surgelés… La pâte rougeâtre et visqueuse qui nimbe tous ces plats provient très souvent du Xinjiang, une province de Chine - pays qui, pourtant, consomme assez peu de tomates.    Comment en l’espace de 20 ans à peine, les cueilleurs et fabricants européens et américains de concentré ont-ils été supplantés par les Chinois, qui fournissent aujourd’hui les géants de l’agro-industrie comme Heinz, Kraft Foods ou Unilever ?..   
      C'est ce qu'on appelle l'Empire de l'or rouge: la filière de la tomate d’industrie, qui est au final aux mains d’une poignée de mastodontes industriels
     Voilà des tomates plus ou moins juteuses qui ont attiré les affaires très juteuses de la mafia italienne "Le chiffre d'affaires dans l'agromafia est estimé à 15,4 milliards en 2014, rappelle Jean-Baptiste Malet. Il n'a jamais été aussi facile pour les entreprises criminelles de faire fructifier des capitaux sales.
  La tomate à cash fonctionne aussià fond dans les Pouilles ou en Sicile
       Récemment, le mensuel 60 millions de consommateurs estimait qu'en France, «une partie de la marchandise viendrait de la fraude par approvisionnement à l'importation». Il semblerait qu'il en soit de même pour l'Italie. Pour Foodwatch, «ces pratiques consistent finalement à arnaquer les consommateurs en les dupant sur la véritable composition des aliments».
          __Comme dit un "vaillant petit économiste",  c’est une de ces tomates à 1€ le kiloIl a fallu :la planter, l’arroser, la surveiller, la repiquerlui mettre un tuteur, la cueillir délicatement afin de ne pas l’abîmer ;le conditionner, le stocker, le transporter sur des milliers de kilomètres en prenant soin de ne pas l’abîmer ;la distribuer, la mettre sur un étalagepayer les employés du magasin et la caissière…Il a fallu faire tout cela avant qu’elle n’arrive dans votre panier… Et encore, au mois de février.Tout ça pour quelques centimes : cela tient de la magie. Si vous avez déjà fait pousser des tomates vous devez vous demander comme moi qui sont les sorciers qui opèrent ce prodige.Ces magiciens, pas plus que les autres, ne révèlent leur tours et vous allez comprendre pourquoi :Pour cette tomate que vous mettez dans votre cabas négligemment on réduit en esclavage des populations, on assèche des pays entiers, on engraisse les mafias, on asphyxie les agricultures des voisins plus scrupuleux, on empoisonne les populations aux pesticidesTout cela pour quelque chose qui ressemble autant au fruit dont il porte le nom que son modèle de plastique avec laquelle ma petite nièce joue à la marchande.Je ne parle pas d’une dérive locale mais d’un phénomène mondial qui touche la Chine, l’Australie, les États-Unis, l’Italie, l’Espagne…En Floride les cueilleurs sont payés 50 centimes pour un panier de 15 kilos de tomates. Pour que cela fasse l’équivalent d’un SMIC français, il faut en cueillir 250 kilos de l’heure, un quart de tonne en 60 minutes, transport jusqu’au camion compris… Dans des serres à 40°C.Et vous, vous cueillez combien de tomates en une heure ?
     Dans le Sud de l’Espagne, les travailleurs clandestins sont parqués dans des hangars insalubres sans eau potable, ni électricité. Ils n’ont pas le droit « d’aller en ville » à cause des désordres qu’ils y causent… Et pour ces taudis on leur extorque la moitié de leur salaire de misère. Il en va de même en Italie… quand les tomates « italiennes » ne sont pas directement importées de Chine. Car si l’Espagne est le spécialiste de la tomate en vrac, l’Italie est imbattable sur les préparations : tomates pelées, concassées, en boites, en sauce ou concentrées : ils inondent le marché de tomates « made in Italy » produites dans des conditions atroces en Chine et qui ne sont que transformées en Italie.Cet « or rouge » est devenu la main-mise de la mafia transalpine que l’on embête moins pour son traffic de tomates que pour le trafic de drogues… Et peu importe qu’il fasse infiniment plus de victimes.Grâce à cet esclavagisme moderne, la main d’oeuvre représente moins d’un tiers du coût de production de cette tomate contre plus de 50% normalement. Et encore, pour faire pousser les tomates en hiver a-t-il fallu transformer un bon morceau de désert Andalous en serre géante… Que l’on voit depuis l’espace !Regardez cette carte satellite de l’Espagne :
 
    Tout au Sud, à l’Est de Malaga et Grenade, vous trouvez Alméria.
Regardez cette tâche blanche sous le « A » de Almeria… Ce sont les serres :  35 000 hectares de désert qui ont été recouvert de plastique.
   Cette « réserve naturelle » désertique a été choisie justement pour son soleil en hiver et surtout pour l’eau. La région d’Almeria est riche de nappes phréatiques abondantes.
Elles devraient être asséchées d’ici 10 à 15 ans. Déjà il faut puiser l’eau à 1500 mètres de fonds pour trouver de l’eau propre aux cultures. Les strates supérieures ont été surexploitées et l’eau de mer salée a remplacé l’eau douce.
    Mais d’ici-là, voici d’où viendront les tomates et les fraises sur les étals en février :
   Il y a quelques années, quand ces fraises de décembre sont apparues, je me souviens avoir demandé à un marchand de fruits comment il avait pu avoir des fraises en plein hiver : « c’est le progrès mon bon monsieur » m’avait-il répondu.
   C’est une telle réussite, un tel « progrès » que moins de 10 ans après, la plupart des gens que je connais refusent désormais catégoriquement d’acheter des fruits et légumes d’Espagne tant ils sont dégoutants.
   Mais il n’a pas fallu plus longtemps pour qu’ils envahissent les supermarchés à tel point que c’est devenu un luxe de choisir un bon fruit ou légume de saison.
Vous pourriez me rétorquer que la vie est déjà suffisamment chère comme cela !
   Mais c’est un cercle vicieux : en détruisant l’agriculture française et ses emplois comme l’on détruit l’industrie et le tissu économique général, on détruit la capacité de millions de personnes à vivre dignement, de leur labeur.
Je ne vous dit pas qu’il faut mettre un mur de Berlin entre la France et ses voisins du Sud mais un peu de bon sens serait bienvenu.
    En Suisse, par exemple, les droits de douanes sont de 5 centimes par kilo de tomate du 21 octobre au 30 avril, soit une taxe symbolique pour payer les formalités.
En revanche, quand revient la belle saison, des quotas sont imposés afin de ne pas étouffer les producteurs locaux par une concurrence déloyale. En dehors des quotas, les droits de douanes sont multipliés par 50 à 2,64 francs par kilo. 
   Ainsi, vous pouvez choisir des tomates insipides en février si cela vous plait. Durant la belle saison, les quotas permettent de moduler l’entrée de fruits et légumes selon les besoins et les agriculteurs Suisses vivent dignement et produisent de bon primeurs bien goûtus.
   Et quand les nappes phréatiques d’Almeria seront épuisées, ils arrêteront de manger des tomates en hiver et leur agriculture ne s’en portera ni mieux, ni plus mal au contraire de l’agriculture française en crise à qui l’on demande des résultats de magiciens… En respectant les règles du jeu.
   Mais en Europe, l’idée de réintroduire un tarif douanier, fusse-t-il intelligent, vital même et gagnant-gagnant est une hérésie qui vous vaut d’être immédiatement excommunié et mis-au-banc de la société parmi les nouveaux ogres et pères fouettards de « l’extrême droite la plus abjecte.... »
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And so on... Il n'y a pas que les tomates.
                                                                    
Prenez votre téléphone.
        Il a sans doute été dessiné en Californie. Les pièces ont été assemblées en Chine, l’écran et le processeur viennent de Corée, eux-même contiennent certains matériaux provenant d’Afrique du Sud. Votre service client se trouve en Irlande et vous-même probablement en France.
     Il en va de même pour presque tous les objets qui vous entourent : 
Cette table en bois de Russie, envoyé en Chine pour y être découpé auquel on ajoute des vis provenant d’Europe de l’Est et livré en France pour une entreprise Suédoise ; 
  Un yaourt à la mangue, dont le fruit a été cueilli en Inde, le lait trait en Allemagne, la recette élaborée en France dans un pot provenant de république tchèque et vendu en Pologne pour un géant de l’agro-alimentaire Suisse.   Une chemise taillée au Bangladesh avec du coton américain, une teinture indienne, une coupe italienne et vendue en Asie.  
Si vous deviez enlever de votre supermarché tous les articles pour lesquels au moins une opération a été faite hors de l’Europe… Il n’y resterait pas grand chose. Et je ne vous parle même pas des produits 100% made-in-France.
      Prenez l’exemple du poulet et des volailles : elles sont difficiles à importer. Les normes sanitaires sont particulièrement contraignantes et le transport compliqué. Pourtant 30 à 40% du poulet que nous consommons est importé… principalement du Brésil et de Thaïlande. ...
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