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mardi 16 février 2021

Inde en rébellion

 Terres et révoltes paysannes

                    Depuis des semaines, les paysans indiens ne cessent de défiler dans les rues de Dehli, de façon parfois véhémente, contre les forces déployées par le Gouvernement Modi.      De futures lois pour libéraliser l'agriculture sont en question. Avec pour toile de fond la contestation d'une tendance générale à la privatisation des terres, qui affecte d'autres parties du monde. De plus en plus, on assiste à l'achat de terre de la part d'Etats ou de groupes industriels, qui y cherchent de nouvelles sources de revenus. Les terres sont devenues un enjeu, aux dépends de la paysannerie traditionnelle.   Comme le souligne une étude d’Oxfam, «l’agriculture a toujours été considérée comme une entreprise risquée qui générait de faibles rendements. Cela a changé ces dernières années, et le système alimentaire en est venu à être considéré comme un secteur qui garantira la croissance à long terme» . (Il est révélateur que les investisseurs milliardaires des États-Unis se soient tournés vers l’achat de terres agricoles: le plus grand propriétaire individuel de terres agricoles aux États-Unis est maintenant Bill Gates, et Jeff Bezos, propriétaire d’Amazon, n’est pas loin sur la liste. Il sera pratiquement impossible de retracer les investissements que ces milliardaires auront pu faire dans d’autres régions plus pauvres, car ils auront été réalisés par l’intermédiaire de diverses sociétés écrans.)

__Dans le droit fil de ce changement d’intérêt des investisseurs mondiaux pour les terres agricoles du Tiers-Monde, la Banque mondiale a consacré son Rapport annuel sur le développement mondial 2008 (ci-après WDR 2008-World Development Report) à l’agriculture. Après plus de deux décennies d’interruption, les auteurs du WDR ont décidé «qu’il est temps de placer à nouveau l’agriculture au centre de l’agenda du développement, en tenant compte du contexte très différent des opportunités et des défis qui se sont fait jour….Cet «accaparement mondial des terres» a suscité de nombreuses critiques. Mais de tels accaparements de terres n’ont pas été tentés uniquement par des pays dépendant des importations alimentaires, comme l’Arabie saoudite ou la Corée du Sud, qui étaient en situation d’insécurité alimentaire.  Aujourd’hui, les transnationales de l’agroalimentaire et les investisseurs financiers géants des pays les plus riches du monde sont eux aussi à la recherche de terres. En effet, la croissance même de l’insécurité alimentaire leur a fait comprendre que les investissements couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur des denrées alimentaires, de la «ferme à l’assiette», pouvaient leur rapporter de riches dividendes dans un avenir par ailleurs incertain..."

             Aujourd'hui en Inde, les paysans ne désarment pas, toujours déterminés, contre la déréglementation de l'agriculture, contre les géants de l'agroalimentaire, que favorise le pouvoir en place.       Une manifestation qui dure, parfois rudement réprimée, bien qu'encadrée. Les enjeux sont d'importance ...                           "...Trois lois adoptées  par le gouvernement par le gouvernement de Narendra Modi sous le nom de Farms Bills, qui engagent une profonde libéralisation du secteur agricole. Elles ouvrent la possibilité aux agriculteurs d’acheter et vendre en dehors des marchés régulés par l’État, appelés mandis. Elles facilitent et assouplissent les contrats entre fermiers et acteurs privés. Elles retirent enfin céréales, légumineuses, huiles alimentaires et oignons de la liste des biens essentiels, qui encadrait les prix et volumes d’achats de ces denrées.  Objectif affiché : « libérer » le secteur agricole du carcan de l’État, attirer les investissements étrangers et permettre aux agriculteurs de dégager des revenus supplémentaires en ouvrant de nouveaux marchés. Mais ces derniers ne croient pas à ces belles promesses. Pour de nombreuses unions agricoles et défenseurs des paysans, le peu de régulations dont bénéficiaient les agriculteurs est simplement supprimé pour les livrer à la mainmise du marché...."   Tout cela malgré les imperfections du système antérieur et ses dérives.   Un mouvement de la plus haute importance, là où l'agriculture tient encore une place majeure dans l'économie de ce grand pays. _____________________

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