Jusqu'où?
Sans parler forcément de lobbying au sens strict, on peut évoquer les courants d'influence ayant parfois pignon sur rue entre l'Empire du Milieu et le pays de Jeanne d'Arc. Certes, les affaires sont les affaires, mais certaines relations dépassent le simple business as usual. On se rappelle de l'affaire Huawei, qui a défrayé la chronique en cherchant à imposer ses normes et ses lois dans différents pays, dont le nôtre. Il ne s'agissait pas seulement d'exporter des téléphones portables...La Chine a ses réseaux, ses cercles, ses rapports d'influence, pas seulement chez nous, le plus souvent en toute discrétion. Pékin a le temps devant lui...Il exerce aussi son action plus ou moins discrète au coeur du système, à Bruxelles, haut lieu du lobbying de toutes sortes et de tous les intérêts privés ou publics, là où se mettent en place des dispositions qui les intéressent, de près ou de loin...Mais la Chine déploie des moyens que d' autres puissances n'ont pas. Ayant déjà fort habilement appris, surtout dans les secteurs de pointe, elle a encore besoin de données et surtout de relations "amicales" pour ce faire. Elle peut compter sur le bon Mr Raffarin, entre autres, mais aussi sur de puissants chefs de groupes industriels, qui savent se faire discrets. Un volumineux rapport du Sénat s'efforce de faire le tour de la stratégie chinoise pour diffuser son soft power dans nos frontières, une influence qui se parer d' aspects innocemment "culturels". Ces analyses et ces recommandations s'intéressent notamment à des aspect moins connus ou soupçonnés, notamment à l'université ou dans le domaine portuaire ou paramilitaire. Les Instituts Confucius peuvent être de bons relais pour l'influence chinoise, comme le signale aussi le Sénat, même dans des lieux apparemment peu stratégiques... C'est de bonne guerre, dira-t-on. Encore faut-il être conscient des enjeux et ne pas être naïf...Il y en aura toujours pour se laisser séduire, par ignorance ou par intérêt. Les ambitions géopolitiques ont le mérite d'être claires.
____Point de vue: "La force de la Chine et de ses dirigeants est d’avoir une stratégie de long terme à trente ans, rendue possible par la stabilité du régime et des institutions, une forme naturelle de patience stratégique et de prudence, mais surtout par l’impression de durabilité du pouvoir en place qui n’a plus d’échéances électorales ouvertes à horizon visible. Dès 2019, le président chinois Xi Jinping a clairement énoncé son objectif stratégique : la Chine devra être redevenue la première puissance mondiale en 2049 lors de la commémoration du centième anniversaire de la République populaire communiste. Pour y parvenir, les dirigeants chinois savent qu’il leur faut d’abord répondre aux aspirations basiques d’une population de 1,4 milliard d’habitants qui font de la Chine le pays le plus peuplé de la planète : de la nourriture, un toit et un emploi pour chacun, et un niveau de vie suffisant pour pouvoir consommer dans un environnement vivable qui ne soit pas trop pollué. Car la Chine est devenue au fil des décennies l’usine du monde, même si ce rôle lui échappe progressivement. Ces mêmes dirigeants savent aussi que leur pays vieillit et qu’il est tiraillé par des forces séparatistes tout comme par la volonté de ses mégapoles devenues riches de gagner en autonomie ; ils misent donc sur un parti unique fort, jouant à la fois le rôle d’ascenseur social et d’outil coercitif pour préserver la cohésion nationale. C’est pourquoi la question de Taïwan reste sans doute la plus cruciale pour les dirigeants chinois qui ne tolèreront pas de voir l’île déclarer son indépendance. S’ils sont convaincus de ne pas pouvoir préserver le statu quo actuel, il est probable qu’ils saisissent la première occasion pour prendre directement ou indirectement le contrôle de Taïwan, ce qui leur donnerait un accès garanti au Pacifique. Sur le plan géopolitique, la grande stratégie chinoise vise à tenir à distance et isoler les rivaux de la Chine, tout en sécurisant ses approvisionnements énergétiques, en matières premières et en ressources stratégiques. Elle semble se décliner en cinq étapes consécutives décrites sur la carte ci-jointe. Les dirigeants chinois jouent au Go et placent leurs pions sur le plateau planétaire avec une logique de long terme, en tentant de ne pas effaroucher leurs adversaires. Vu sous cet angle, leur concept de nouvelles routes de la soie terrestres et maritimes sert à la fois à pénétrer les marchés d’Asie centrale, du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Europe orientale, tout en étouffant progressivement le rival régional indien. Le Moyen-Orient et le bassin méditerranéen représentent pour la Chine un réservoir d’énergie qui alimente la moitié de sa consommation pétrolière, et un carrefour stratégique qui lui permet de poursuivre son expansion économique et politique en direction de l’Europe, de l’Afrique et de l’Amérique latine. Pour sécuriser ses approvisionnements en hydrocarbures, la Chine devra sans doute s’engager davantage au Moyen-Orient. Sur le plan militaire, au-delà de la croissance spectaculaire de ses forces aériennes et navales, la Chine fait face à un dilemme. Elle cherche à tout prix à éviter une confrontation majeure avec les États-Unis, l’Inde et la Russie, tous trois dotés de l’arme nucléaire, mais aussi à éviter une guerre avec le Japon (adversaire historique) dont elle n’est pas sûre de sortir vainqueur. Mais pour monter en gamme et en crédibilité, et pour aguerrir ses combattants, elle sait qu’il lui faudra sans doute accepter des affrontements limités. Ceux-ci pourraient survenir à Taïwan bien sûr, tout comme en Asie du Sud-Est, en mer de Chine et en océan Indien. En attendant, la Chine s’est lancée dans la bataille, en intégrant la menace de la force militaire dans une approche globale qui recouvre les domaines informationnel, culturel, économique, financier, politique, légaux, normatif, écologique, biologique, cyber... Elle cherche en priorité à rattraper son retard technologique afin d’espérer dépasser les États-Unis dans ce domaine. La conquête spatiale représente pour elle un champ idéal mêlant prestige et progrès scientifique...." ________
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