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jeudi 26 mars 2020

Journal de crise (5)

Un jour de plus...
                       Les jours se suivent et se ressemblent...sinistrement.
                           Nos vies ont déraillés, comme si on en avait perdu le mode d'emploi ...
   Il y aura un avant et un après, cela paraît une certitude, sans que l'on puisse donner un visage à cet après qui est par nature indéterminé. Le meilleur est souhaité, mais n'est pas assuré.
   C'est justement dit:

             Nous vivions des temps hypnotiques: nous allions d'un point à l'autre, de son domicile au travail, du travail à son domicile, comme de parfaits automates, rompus à une routine qui si elle pouvait parfois se montrer pesante avait l'avantage de nous occuper l'esprit. Nous n'étions pas vraiment au monde, nous nous contentions d'occuper l'espace que la société nous avait réservé et jour après jour, semaine après semaine, dans ce long continuum d'années qui finissait par former une vie, nous allions sans prendre soin de nous interroger sur le sens même de nos existences.Tout cela a volé en éclat.Nous voilà soudain nus face à nous mêmes. Chaque nouvelle journée est comme un long voyage dont nous ignorons les différentes étapes. Nous n'avons plus de structures, aucun objectif à atteindre, et cernés par l'ennui qui menace à tout moment de nous engloutir, nous cherchons un moyen de ne pas sombrer tout à fait. Nous chancelons sur nous-mêmes et pris dans les rets de ce vertige immobile, nous cherchons désespérément une branche à laquelle se raccrocher.Nous ne sommes pas malades, nous ne sommes pas vraiment en vacances mais tout ce qui hier était encore source de plaisirs, les amis, les sorties, les ivresses légères des terrasses de cafés, les promenades au large, les nuits étoilées quand les cœurs robinsonnent –la frivolité comme projet de vie– tout cela nous est désormais interdit....
    Nous avons tous été baisés biaisés, pris de court. Bien que nous aurions pu savoir et anticiper, l'impréparation a été manifeste et nos systèmes de santé ont été réduits depuis des années pour des raisons budgétaires à courte vue et la recherche a baissé la garde, victime du culte du rendement. Malgré les alertes des services de renseignement et des autorités sanitaires il y a de cela plusieurs mois. Sans parler des lenteurs  et des incoordinations.
 Les dénégations ont d'abord été nombreuses et certains veulent déjà  virer de bord. Business first!
Et pourtant, le spectre d'une dépression sévère pointe à l'horizon, dont on imagine encore mal les contours, la profondeur. et la longueur. Les parades et les solutions ne pourront être que mondiales. Il n'y aura pas de salut dans le repli frontalier, étant données les interactions de fait de la mondialisation, même si elle est appelée à se réduire.
  Le risques est grand de dérapages et d'abus de toutes sortes et il va falloir être vigilant sur le devenir des mesures provisoirement prises par nécessité, pour que l' Etat de droit retrouve son fonctionnement normal une fois la bourrasque passée.
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