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mercredi 8 juin 2022

Réindustrialisation?

Réindustrialiser, disent-ils...

                                          La réindustrialisation est (re)devenue un objet de débat central dans l'horizon économique français. Après des années où la France a laissé disparaître ou filer sous d'autres cieux des fleurons de son activité économique. La volonté de relative dé-mondialisation actuelle, surtout suite à la prise de conscience de nos fragilités à la suite du l'épisode de la covid, qui a servi de révélateur, pousse les responsables économico-politiques à revenir à une souveraineté largement perdue.                                                                                                               Il fut un temps pas si lointain où Alain Minc s'imposait comme le grand gourou de la "mondialisation heureuse", de l'ouverture au grand large, transocéanique, où iraient s'exercer à bas coût des tâches et des productions qui ne nous reviendraient plus, le développement des services étant devenu le nouveau graal de l'activité économique, l'Etat abandonnant des pans de sa fonction régulatrice, conformément à la doctrine anglo-saxonne en vogue de la dérégulation généralisée. Les délocalisations à tout va passèrent par là, dans un nouvel "ordre mondial".  Aujourd'hui, le roi est nu, du fait des dogmes néolibéraux qui inspirèrent des décisions au niveau le plus élevé.


                                                                                    Point de vue: Pour Nicolas Dufourcq, qui en reste plus au niveau des symptômes que des causes profondes:    "... Entre 1995 et 2015, la France s'est vidée de près de la moitié de ses usines, et du tiers de ses emplois industriels. "En 1994-1995, on est dans un moment idéologique très particulier, à Londres, à Paris et aux Etats-Unis, où la croyance dans le libre-échange est totale. Tout le monde conçoit qu'il ne fera aucun perdant, sauf que ça ne va pas se passer comme ça", commence Nicolas Dufourcq, Directeur général de BPI France depuis sa création en 2013.                  "Un long courant est monté pendant les années 1970 sur la question de savoir si l'industrie c'était Zola ou pas. L'industrie c'était sale mais aussi extraordinairement autoritaire. A cette époque, commence à émerger une nouvelle génération de jeunes français qui ne veulent plus de ça", poursuit-il.     La politique sociale de la France est-elle une des causes de la désindustrialisation ? Oui, selon Nicolas Dufourcq, même si "ce n'est pas la seule". "Il y a eu un moment d'accélération radicale, entre 1995 et 2003, où on aurait dû prendre conscience du fait que l'industrie française pouvait être détruite, comme on a pris consciente au début des années 1960 que la paysannerie française pourrait être détruite par le traité de Rome. Au début des années 1960, on a fait ce qu'il fallait : on a créé la politique agricole commune (PAC). Mais [pour l'industrie], on a pensé que ça irait, sauf que non. On a même mis en œuvre des réformes qui étaient absolument orthogonales aux besoins de l'industrie : l'augmentation des cotisations sociales, sans parler des 35h qui ont totalement déstabilisé l'industrie française", estime Nicolas Dufourcq.   Ce débat se résume-t-il à un clivage gauche-droite ? "Non, ce qui est très intéressant dans cette affaire, c'est qu'à peu près tout le monde est coupable : l'éducation nationale, les médias, les banques, les industriels eux-mêmes qui ne s'étaient pas bien préparés." Il ajoute : "Il y a une différence incroyable entre les lièvres et les tortues : l'écart-type entre ceux qui se préparent réellement à l'avenir, par une fuite en avant dans l'innovation, et ceux qui pensent qu'on peut persévérer dans l'être. Le rôle de la BPI que je dirige est d'emmener tout le monde dans l'innovation."   Pourquoi la France est d'un des pays européens qui a vécu la plus forte désindustrialisation ? "La deuxième désindustrialisation, celle qui commence en 1995 en Europe continentale, ne touche pratiquement que la France. Il y a une spécificité française : il y a eu un contrat social contre l'industrie. Le chômage de masse créé lui-même une fuite en avant dans l'imaginaire, consistant à penser que la solution au chômage ce sont les services, que ça ne sera jamais l'industrie."    Nicolas Dufourcq estime aussi qu'il y a eu un soucis dans la formation des jeunes, avec la généralisation de l'accès au baccalauréat général, au détriment des lycées professionnels. "Tout le monde a choisi de faire partie de la bourgeoisie des villes, or l'industrie c'est la campagne. Rapidement, les familles ont compris que les lycées professionnels, ça n'était pas le lieu où on allait pouvoir capter les éloges de la société française. On a un énorme sujet aujourd'hui sur l'enseignement professionnel", poursuit-il. "La conviction de la BPI est claire : c'est que ce sont les entrepreneurs qui vont régler le problème."      "Fallait-il sacrifier l'environnement sur l'autel de l'industrie ?", l'interroge-t-on. "Il faut savoir ce qu'on veut. On est dans une explosion d'innovation technologique dans l'industrie. C'est tout à fait compatible avec l'environnement, mais il faut faire vite. Il y a une compétition à la réindustrialisation. Nous sommes beaucoup trop lents. On ne peut plus se payer le luxe d'attendre six, sept, huit ans pour avoir des autorisations pour des motifs environnementaux quand on réouvre une usine dans un village." Nicolas Dufourcq cite en conclusion de "belles histoires de réindustrialisation dans les régions françaises". "Le textile tout le monde pense que c'est mort mais pas du tout. On est en train de réinventer le textile français". "L'industrie, c'est l'amour de la machine. J'ai voulu faire ce livre car au moment où on rebascule vers un possible, le possible d'une industrie magnifique, il faut qu'on soit tous d'accord sur la désindustrialisation des années 2000"..."  ___________

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