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jeudi 20 janvier 2011

Braderie nationale


Le coin des affaires

Profitez-en !!

__En mal de ressources ("les caisses sont vides"! disait-il...), l'Etat est actuellement saisi par la fièvre marchande: il va vendre 1 700 biens immobiliers en trois ans. Une vente qui a l'ambition d
e participer " au redressement des finances publiques”, relève le ministère du budget qui précise que les opérations de cession “permettent d’apporter une contribution au désendettement correspondant, en règle générale, à 15 % du produit de la cession”. Cette contribution au désendettement a représenté 427 millions d’euros depuis 2005.
_____Parfait. Projet louable dans son principe. Pourquoi, en effet, devrions-nous entretenir à grands frais des biens immobiliers souvent délaissés ou sous-utilisés?

_Pas de problème pour mettre en vente telle ancienne maison de garde-barrière ou de garde-forestier, telle friche devenue inutile, vouée à la ruine ou à l'abandon. Rien à dire concernant la vente de tel immeuble parisien, possession de l'Etat pour des raisons parfois obscures, abandonné ou sous-utilisé. Pourquoi pas non plus certaines propriétés foncières à vocation de pur prestige, dont seulement quelques privilégiés peuvent avoir épisodiquement la jouissance, et dont l'entretien pèse sur nos finances?...Même si l'opération rapporte moins que prévu...
_________Mais il existe certains
BIJOUX DE FAMILLE dont la cession apparaît plus discutable, dont la liquidation heurte. Par exemple, l'Hôtel de la Marine est bradé pour une poignée d'euros ___(Une longue liste...)
Un collectif d'historiens "considère que ce lieu fait partie intégrante de l’histoire de France". Ils estiment que «
quiconque éprouve encor
e un minimum de respect pour le passé national, pour les pierres chargées de symboles et d'une histoire qui touche tous les Français, ne peut qu'être révulsé à l'idée que l'Hôtel de la Marine soit alloué le 17 janvier -demain !- sans protestation aucune ». D'après les six historiens, « la France ne perd pas sa mémoire, elle la vend ».
_Cette réaction ne relève pas d'une nostalgie désuète. L'attachement à certains
lieux de mémoire hautement symboliques, témoins de périodes fortes de notre notre passé, éléments de notre identité, fait partie de notre histoire, de notre culture à tous . Abandonner à la gestion privée les traces matérielles majeures de notre aventure nationale, notre héritage essentiel, ne peut que choquer.
_Demain, l' Hôtel de la Marine pourrait peut-être devenir le siège d'une grande banque.
Pourquoi pas Matignon transformé un jour en Mc Do géant, l'espace de la Tour Eiffel voué à un Super-Disneyland d'un nouveau genre ou Versailles aménagé en complexe hôtelier de très haut standing, géré par un nabab du pétrole?...
Malgré les appels élyséens à l'identité nationale, glisse-t-on lentement mais sûrement vers une logique purement privée dans le domaine patrimonial?
Malraux, réveille-toi!

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"...Au détour de l’article 52 de la loi de finances 2010 se profile clairement la destruction par l’état sarkozyste de plus de deux siècles de protection du patrimoine national.

C’est en effet en 1794 que l’abbé Grégoire, s’en prenant au vandalisme révolutionnaire (« Je créai le mot pour tuer la chose » disait-t-il), affirme l’existence d’un patrimoine collectif que la Nation a pour mission de protéger : « le respect public doit entourer particulièrement les objets nationaux qui, n’étant à personne sont la propriété de tous ». La Convention décide dans la foulée de protéger « les objets qui intéressent les arts, l’histoire et l’instruction ».

Guizot en 1830 crée le premier poste d’inspecteur des monuments historiques, poste que Mérimée occupera avec passion de 1834 à 1853, jetant les fondements de la protection par l’Etat des monuments importants et instituant à cette fin le classement des édifices. Les régimes politiques successifs ont tous depuis poursuivi ce processus de sauvegarde par l’Etat des œuvres patrimoniales dont la définition s’est étendue de façon exponentielle au XXème siècle : aux bâtiments anciens sont venus s’ajouter des créations contemporaines, des témoins de la mémoire industrielle, des jardins et, plus récemment encore, des « lieux de mémoire » (mur des fédérés, Oradour sur Glane…). Le succès, qui ne se dément pas depuis leur création en 1984, des journées du patrimoine, témoigne de l’adhésion des Français à l’idée d’un patrimoine commun à protéger.

Déjà en 2003 Jean-Jacques Aillagon avait autorisé la cession de certains monuments aux collectivités territoriales mais, outre que peu d’entre elles s’étaient empressées d’acheter des édifices d’un entretien souvent coûteux, le ministre de la culture avait alors limité très précisément les possibilités pour l’Etat de se défaire de son patrimoine. Or l’article 52 de la loi de finances élargit le périmètre des monuments et sites transférables, qui ne sera plus limité à une liste fixée par décret et couvrira dès 2010 la totalité des monuments appartenant à l'Etat et à l'ensemble de ses établissements publics, en outre l’Etat pourra maintenant se défaire aussi des objets mobiliers classés. On peut à première lecture se dire que, si l’Etat cède son patrimoine aux collectivités territoriale il n’ y a que moindre mal, sauf que, la loi étant muette, rien n’interdira aux dites collectivités de pratiquer un nouveau transfert au profit d’une entreprise culturelle à visée commerciale ou même d’un particulier.

Enfin il est essentiel de signaler que seul le préfet aura à se prononcer sur les cessions, le ministère de la culture, pourtant concerné au premier chef, n’ayant pas à être consulté. Une partie de l’UMP s’en réjouit ouvertement et le rapporteur spécial de la commission des finances du sénat, Yann Gaillard, a ces mots qui dévoilent la logique à l’œuvre : ce processus « s'inscrit dans la droite ligne de la « désétatisation » du patrimoine monumental …préconisée dans [un] rapport de 2002 sur le patrimoine monumental. De fait, c'est à la société tout entière qu'il appartient de conserver et d'entretenir le patrimoine, l'Etat ne pouvant se prévaloir d'aucun monopole en la matière. » Cette distinction entre Etat et société toute entière, signe tout simplement l’arrêt de mort de la politique patrimoniale nationale. L’extrême gravité de cette décision explique la réaction inquiète de quelques députés de droite comme Nicolas Perruchot, rapporteur spécial de la commission des finances de l’Assemblée Nationale qui, ne voulant pas s’opposer à la logique libérale en action, propose d’au moins « recenser, au sein d’une « liste négative » les éléments du patrimoine national non transférables ». Ainsi l’Arc de Triomphe, Versailles, les Invalides ou le Louvre (ce sont les exemples cités par Nicolas Perruchot) seraient déclarés « non transférables « mais on pourrait très bien imaginer qu’un préfet accepte de se défaire de la cathédrale de Chartres, de la colonne Vendôme ou du pont du Gard, voire du Mont Saint Michel si cher au cœur de Nicolas Sarkozy..." (Marie Lavin)

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