Et pourtant ils lisaient...
Dans les tranchées, à l'arrière.
Partout où ils pouvaient.
Malgré les conditions souvent décrites par Barbusse, Genevoix, Jünger, et les autres, malgré le froid, la pluie, la maladie, la vermine, la faim, les 800 morts en moyenne par jour pendant de si longues années.
Dans ce désastre mangeur d'hommes, usant et démoralisant, le désoeuvrement passager ou durable, l'éloignement des proches, à quoi se raccrocher?
Dans la guerre au quotidien, pendant les périodes d'attente ou de repos, dans ces combats de position épuisants, on ne faisait pas qu'écrire (parfois journellement) et lire le courrier.
L'Etat-major y veillait, pour le moral, régulièrement mis à mal par le feu et l'assaut, souvent inutile.
Il fallait bien tuer l'ennui, oublier un peu la mitraille, faire mentalement quelques parenthèses dans cette boucherie inédite, retrouver un mince contact avec le monde extérieur.
Ils lisaient énormément, moins analphabètes qu'on le croit. Des journaux tiraient en 1900 à plus de quatre millions d'exemplaires. Un adulte sur deux lisait un journal.
Ils lisaient tout ce qui pouvait tomber entre leurs mains, journaux et feuilletons, livres d'aventures ou patriotiques (comme Nos diables bleus), mais pas toujours. Certains osaient une littérature moins conventionnelle.
C'était si facile à emporter et à prêter, un livre.
Malgré les contrôles (imparfaits, même en 1917), la propagande de guerre véhiculée par la presse recommandée qui s'autocensurait le plus souvent, comme le Petit Parisien, sauf quand quelques Albert Londres décrivaient sans fard la réalité de Verdun, tout, ou presque, pouvait arriver jusqu'aux premières lignes, même le Canard enchaîné. Sauf Jaurès.
Entre 1914 et 1918, 450 journaux, parfois éphémères, sont nés dans les tranchées, comme Le Canard du Biffin.
On bricolait aussi, en dehors des tâches imposées, on sculptait parfois, on dessinait, naïvement ou savamment.
La caricature de l'ennemi devenait de moins en moins crédible au cours du temps.
La lecture n'eut aucun pouvoir subversif. Elle fut juste récréative, si l'on peut dire, du moins pour ceux que les événements dépassaient, noyés dans le séisme. La superficialité anecdotique, la censure, le conformisme militaire, l'unanimisme patriotique, la peur rendaient toute colère, toute contestation de la guerre, parfois éruptive, marginale, intime et secrète.
Le harassement submergeait tout. Survivre devenait le plus souvent la hantise dominante.
_____
* Les carnets de guerre de Louis Barthas
* Le blog de guerre de H. Flamant
* Vivre et mourir dans les tranchées
* C'était l'époque des moissons
_________________
Le feu , les liaisons dangereuses, Gaspard, le Petit Parisien (voir ici le numéro appelant à la mobilisation) ou le Canard Enchaîné sont les livres et les journaux qui ont accompagnés les poilus (les deux tiers de la population masculine adulte de la France) dans les tranchées.
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Dans les tranchées, à l'arrière.
Partout où ils pouvaient.
Malgré les conditions souvent décrites par Barbusse, Genevoix, Jünger, et les autres, malgré le froid, la pluie, la maladie, la vermine, la faim, les 800 morts en moyenne par jour pendant de si longues années.
Dans ce désastre mangeur d'hommes, usant et démoralisant, le désoeuvrement passager ou durable, l'éloignement des proches, à quoi se raccrocher?
Dans la guerre au quotidien, pendant les périodes d'attente ou de repos, dans ces combats de position épuisants, on ne faisait pas qu'écrire (parfois journellement) et lire le courrier.
L'Etat-major y veillait, pour le moral, régulièrement mis à mal par le feu et l'assaut, souvent inutile.
Il fallait bien tuer l'ennui, oublier un peu la mitraille, faire mentalement quelques parenthèses dans cette boucherie inédite, retrouver un mince contact avec le monde extérieur.
Ils lisaient énormément, moins analphabètes qu'on le croit. Des journaux tiraient en 1900 à plus de quatre millions d'exemplaires. Un adulte sur deux lisait un journal.
Ils lisaient tout ce qui pouvait tomber entre leurs mains, journaux et feuilletons, livres d'aventures ou patriotiques (comme Nos diables bleus), mais pas toujours. Certains osaient une littérature moins conventionnelle.
C'était si facile à emporter et à prêter, un livre.
Malgré les contrôles (imparfaits, même en 1917), la propagande de guerre véhiculée par la presse recommandée qui s'autocensurait le plus souvent, comme le Petit Parisien, sauf quand quelques Albert Londres décrivaient sans fard la réalité de Verdun, tout, ou presque, pouvait arriver jusqu'aux premières lignes, même le Canard enchaîné. Sauf Jaurès.
Entre 1914 et 1918, 450 journaux, parfois éphémères, sont nés dans les tranchées, comme Le Canard du Biffin.
On bricolait aussi, en dehors des tâches imposées, on sculptait parfois, on dessinait, naïvement ou savamment.
La caricature de l'ennemi devenait de moins en moins crédible au cours du temps.
La lecture n'eut aucun pouvoir subversif. Elle fut juste récréative, si l'on peut dire, du moins pour ceux que les événements dépassaient, noyés dans le séisme. La superficialité anecdotique, la censure, le conformisme militaire, l'unanimisme patriotique, la peur rendaient toute colère, toute contestation de la guerre, parfois éruptive, marginale, intime et secrète.
Le harassement submergeait tout. Survivre devenait le plus souvent la hantise dominante.
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* Vivre et mourir dans les tranchées
* C'était l'époque des moissons
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Berger Levrault crée en 1915 la collection Bibliothèque des poilus les auteurs célèbres au bivouac : ouvrages bon marchés facilement transportables par les soldats.
Voir la liste des journaux des tranchées en ligne numérisés par la BDIC.
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