Précarité d'hier et d'aujourd'hui
Au coeur de nos société industrielles dites "en
crise" (financières et de surproduction surtout), mais où la répartition
d'une richesse de plus en plus grande pose problème, s'incruste une
tendance lourde liée à la rareté montante de l'emploi,sous le double
effet de la délocalisation de pans entier de secteurs de production et
d'une mécanisation-robotisation toujours plus poussée, pour abaisser les
coûts de production, dans une concurrence devenue mondialisée, de
guerre économique, de conquête de marchés, devenus l'alpha et l'omega
des majors de la production de masse.
_____ Ce n'est plus le louage de
la force de travail du début du 19° siècle, liée à la bonne volonté de
l'employeur, au gré des circonstances.. Des luttes et des lois sociales
sont passées par là. Même si aujourd'hui on cherche à les remettre du
moins partiellement en question ou à les dénaturer. L'exemple le plus extrême est le "contrat zéro heure", développé aux Royaume-Uni, qui ne peut exister que dans le contexte d'un chômage de masse, que l'on veut ainsi masquer, malgré les excès et le mal vivre. Mieux vaut un emploi (très) mal payé que pas d'emploi du tout, comme on le proclame en Allemagne dans le cadre du système mis en place par les lois Schröder-Hartz.
__ Inévitablement, quand monte ces formes de précarité, plus nombreux
dans les services, les salaires ont tendance à s'aligner sur les moins
offrants. L'intérim existe depuis les années 70 et tend dans certains
secteurs à se rapprocher des conditions notées plus haut.
________ Serions-nous condamnés à une précarité à vie?
A. Smith ne considérait pas ce processus comme inévitable. Mais il ne prévoyait pas l'évolution du capitalisme sous sa forme actuelle.
Sa réduction supposerait de profondes réformes économiques et financières.
_____ Le libéralisme nous conduit par essence à l'incertitude, comme le disait cyniquement Mme Parizot (La vie est faite d'incertitude, pourquoi le travail ne le serait-il pas?).
Pierre Bourdieu constate que « La précarité affecte profondément celui
ou celle qui la subit, en rendant tout l’avenir incertain, elle interdit toute anticipation rationnelle et, en particulier, ce minimum de croyance et d’espérance en l’avenir qu’il faut avoir pour se révolter, surtout collectivement, contre le présent, même le plus intolérable ».
_ Cette précarité n’est pas que le produit du mauvais fonctionnement du
marché et de la répétition des crises du capitalisme. Il a été pensé
comme une donnée inévitable dans le cadre du marché repensé par les
ultra-libréraux de l'école de Chicago, dans l'héritage de Hayeck.
____ Si on se fie aux chiffres plus ou moins officiels et toujours mouvants, la précarité touche plus de 3 millions de travailleurs en France. Chez les jeunes elle concerne environ 50%. Dont 1 million de travailleurs pauvres.
En Allemagne,
le nombre de travailleurs précaires-pauvres, c’est-à-dire gagnant moins
des deux tiers du salaire horaire médian, a explosé : ils représentent
désormais 22% du salariat, contre moins de 7% chez nous. Au total, près
de 6,5 millions d’Allemands sont aujourd’hui payés moins de 8,50 euros
l’heure, surtout dans la distribution et l’hôtellerie-restauration
En Espagne, la précarité explose. Aux USA, elle est devenue massive. .
La précarité serait-elle en voie de devenir le régime normal?
____ On peut toujours aller plus loin: lois Hartz en Allemagne et contrat zéro heure en Grande-Bretagne...La menace permanente du déclassement et de l'extrême pauvreté entraine la résignation. Il n'y a pas d'alternative, leur répète-t-on...
___ La montée de l'incertitude au coeur de l'emploi, la précarité,
devient un problème majeur au coeur de l'économie dérégulée, issue de
l'application du néolibéralisme financier et de la concurrence mondiale
sans frein.Le témoignage de l'expérience volontaire de Florence Aubenas (1) nous en donne un exemple limité mais vivant. .Il semble que la déstructuration de l'organisation du travail ne connaisse pas de limites, comme le montre l'étude suivante: L'auteur de cette recherche décrit un système.______
Etymologiquement,précaire vient du latin juridique precarius, désignant
ce qui était "obtenu par la prière", supplique généralement adressée à
celui dont on dépend, suzerain ou maître...La précarité implique un
rapport social inégal, dans lequel le bénéficaire d'une faveur se soumet
à celui à qui la lui accorde.
______Certaines dispositions si contestées de notre
projet de nouveau droit du travail "modernisé et allégé" macronisé, ne
vont-elles pas dans cette direction régressive possible?
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