Uber: über alles?
Ubérisez-vous! disent certains, adeptes d'une nouvelle foi s'appuyant sir les possibilités offertes par les diverses nouvelles technologies numériques.
En dehors du problème des transports par taxis -qui créent des tensions en France comme ailleurs-, l'ubérisation est une tendance lourde, un peu fourre-tout, qui a prétention à vouloir affecter en profondeur un grand nombre de secteurs de l'économie et des services.
Que ce soit dans le domaine de la consommation ou de l' économie collaboratives, on voit éclore une foule de projets et de débuts de réalisation qui ne manquent pas toujours d'intérêt à première analyse, mais qui suscitent un grand nombre de réactions hostiles de tous bords, dans de nombreux pays.
Mais est-ce une bataille déjà perdue? Pas seulement dans les transports ou l'hotellerie.
Bien que ce soit encore un phénomène mal perçu, il fait déjà apparaître un certain nombre de problèmes de fond;
Pour E.Morozov, l'uberisation est le miroir de l'impuissance publique face aux géants, notamment de de la Silicon Valley et des forces financières qui les appuient. (*)
Il exprime aussi un rapport particulier à la loi.
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___ (*)...(sa) la politique du « low cost » trouve aussi une explication plus
triviale : grâce aux énormes capitaux de ses investisseurs, la compagnie
peut se permettre de brûler des milliards dans le seul but d’éliminer
toute concurrence, celle des taxis de la vieille époque aussi bien que
celle des petites start-ups ingénieuses comme Kutsuplus.
Dans un article récent, The Information,
un site Internet spécialisé dans les nouvelles technologies, indiquait
que durant les neuf premiers mois de 2015 les pertes d’Uber s’élevaient à
1,7 milliard de dollars, contre seulement 1,2 milliard de recettes. La
compagnie est assise sur une montagne d’argent si colossale que, dans
certaines villes des États-Unis, elle propose des courses à un prix qui
ne couvre même pas le coût du carburant et de l’usure du véhicule.
Sa stratégie est simple : faire exploser la demande en abaissant les
prix à un niveau tellement attractif qu’il finit par vaincre les
réticences de ceux qui préfèrent normalement prendre leur voiture
personnelle ou les transports publics. Aucune dépense n’est trop
fastueuse pour atteindre cet objectif. Au passage, Uber se taille aussi
des parts grandissantes sur les marchés adjacents, comme le transport de
biens de consommation ou la livraison de colis...
Une question se pose alors inévitablement, même si elle est rarement
posée : de qui Uber consume-t-il ainsi l’argent ? D’investisseurs tels
que Google, d’Amazon, de Goldman Sachs. Uber fournit l’exemple parfait
d’une compagnie dont l’expansion planétaire fulgurante est redevable en
grande partie à l’incapacité des gouvernements de taxer les profits des
géants de la finance et des technologies.
Pour le dire plus crûment : si Uber peut jongler avec tous ces
milliards, c’est parce que les Etats ne le peuvent plus. Au lieu
d’alimenter les caisses publiques, cet argent s’entasse sur les comptes
offshore de la Silicon Valley et de Wall Street. Ses propriétaires ne
s’en cachent même pas. Apple a annoncé récemment qu’elle trônait sur un
magot de 200 milliards de dollars soustraits à toute ponction fiscale,
tandis que Facebook se vante d’un bénéfice record de 3,69 milliards de
dollars pour 2015....
La leçon à retenir, c’est que la politique menée par un pays en
matière de nouvelles technologies dépend directement de sa politique
économique. La première ne peut fonctionner qu’avec le concours de la
seconde. Des décennies de choix fiscaux laxistes, cumulées à une stricte
adhésion aux canons de l’austérité, ont réduit à néant les ressources
publiques nécessaires à l’expérimentation de nouvelles manière de
fournir des services collectifs, notamment dans le domaine des
transports.
Il en résulte que les gros industriels nourris à l’évitement fiscal
et les fonds de placement spéculatifs — qui envisagent la vie
quotidienne comme un terrain de prédation entrepreneuriale — ont le
champ libre pour s’accaparer les projets de ce type. Ce n’est pas une
surprise si plus d’un a commencé comme Kutsuplus pour finir comme Uber :
le fait de s’en remettre à des investisseurs qui attendent des retours
exorbitants conduit fatalement à ces métamorphoses....
__... Les principaux faits reprochés se sont déroulés en 2014 et 2015 et
concernent UberPop. La justice vise la mise en relation, via la
plateforme UberPop, de clients avec des particuliers s’improvisant
taxis. La pratique commerciale trompeuse cible trois spots diffusés sur
Radio Nova à Bordeaux invitant les auditeurs à devenir chauffeurs pour
gagner un peu d’argent. La dernière série de délits concerne tous les
services Uber, et vise la loi Informatique et liberté. Le parquet
reproche à l’entreprise d’avoir conservé des données personnelles de
clients au-delà du délai légal, d’avoir numérisé et conservé des permis
de conduire et cartes d’identité sans l’avoir suffisamment déclaré à la
Cnil, et d’avoir constitué des fichiers comportant des informations sur
les chauffeurs, notamment sur leur casier judiciaire.
Ce sont ces
fichiers, contenus dans des disques durs collectés lors d’une
perquisition au siège de l’entreprise mi-2015, qui avaient conduit à
reporter le procès après sa première audience, le 30 septembre dernier :
la défense ne s’était pas vu transmettre le contenu des disques durs,
et la présidente du tribunal, Cécile Louis-Loyant, lui avait accordé le
droit de les explorer en profondeur avant de reprendre l'audience cette
fin de semaine...
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